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D’après Dominique Bourg, les générations futures… C’est nous !

Publié le 26 août 2015 , mis à jour le 09 décembre 2020

Dominique Bourg, philosophe et Vice Président de la Fondation Nicolas Hulot explique dans un entretien accordé à la Revue Projet qu’il faut se mobiliser pour affronter le réchauffement climatique à venir car une partie est dors et déjà inévitable. Pour cela, mobiliser la spiritualité qu’il définit comme un imaginaire sociale lui semble un levier essentiel.

Extraits

Si nous ne réagissons pas tant que la catastrophe n’est pas arrivée, y a-t-il malgré tout des leviers pour agir aujourd’hui ? La question n’est-elle pas : sur quoi allons-nous nous enthousiasmer ? Plutôt que : de quoi allons-nous avoir peur ?
Absolument. Ni la peur ni la culpabilité ne sont des mobiles profonds et efficaces. Il faut avoir ce nœud de convictions et d’espérance qui fait que l’on résiste, quoi qu’il nous arrive. S’il n’y a plus d’espérance, on peut aller dans la pire des violences. Notre responsabilité morale est de nous préparer maintenant et de chercher à éviter la catastrophe. On peut reprendre l’analogie de la chute de Rome et du christianisme. Dès la fin du IIIe siècle, une partie des élites romaines déserte la ville et se convertit au christianisme. Ces gens vont créer des monastères et reconstruire la Gaule. Sur sa fin, Rome, c’est une fiscalité complètement folle, des citoyens qui ne croient plus dans l’empire, des gens que l’on transforme en esclaves par l’endettement, etc. C’est un État cynique, qui ne protège plus ses citoyens. N’est-ce pas ce que fait l’Europe aujourd’hui ? 12 millions d’archi-pauvres en Allemagne, combien en France ? Et combien dans quelque temps avec notre système économique ? On observe alors une déshérence, un arrachement aux croyances majeures, une recomposition de petites communautés qui revivent autrement. C’est pourquoi je milite pour un droit dérogatoire à l’expérimentation écologique, qui est forcément une expérimentation spirituelle, sans pour autant renoncer à sauver ce qu’on peut de nos institutions. Nous n’éviterons pas de lourdes difficultés, mais on peut semer des graines pour que, dans l’épreuve, des choses tiennent et se développent. C’est ce que j’attends de la spiritualité.
À qui revient-il de nous engager dans cette démarche spirituelle, en rupture avec la spiritualité dominante ? Y a-t-il des conditions qui nous y entraîneront ? S’agit-il de rendre visible ce qui ne l’est pas aujourd’hui ?
Si je tenais à revenir sur la définition de la spiritualité, c’était pour montrer son universalité : il n’y a pas de société humaine sans une réponse spirituelle. La nôtre est en creux, mais elle est là. La spiritualité n’est pas une fantaisie dont on peut se passer, c’est ce que Castoriadis appelle l’imaginaire social. Il s’agit de construire des modèles humains qui permettent à la société de fonctionner : le prof compétent, le soignant attentif, l’agriculteur bio, etc. Une partie importante des gens est convaincue qu’il y a un problème de finitude et que l’on ne s’en tirera pas indéfiniment sans rien changer. Il s’agit de représentations, et cela ne veut pas dire que l’on va faire quoi que ce soit, mais je crois que cette évolution est plus large que ce que l’on imagine. Beaucoup de gens inventent de nouveaux modèles : les écovillages, les « fab labs » un peu écolos, les villes en transition, le mouvement Unmonastery, etc. Le problème, c’est de savoir où amener ces gens à se réunir de temps en temps, pour réfléchir vraiment sur leur pratique et se poser la question spirituelle. Il conviendrait de mailler ces initiatives, de les faire connaître et se connaître. Il s’agit de prendre ce qui existe, de l’approfondir, pour créer une sorte de résilience pour les décennies à venir.

Retrouvez l’intégralité de l’entretien sur le site de la revue Projet (qui donne accès gratuitement à tous les articles récents pendant deux mois).

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